La Cour Suprême, gardienne de la démocratie indienne

Olivier Da Lage

 

Tous les candidats à des élections en Inde doivent désormais publier leur casier judiciaire, ainsi en a décidé fin septembre 2018 la Cour Suprême du pays qui, dans sa décision inédite, précise que la criminalisation de la politique indienne est comme « une termite rongeant l’édifice de la gouvernance constitutionnelle ». Cette décision n’a pas plu, c’est peu de le dire, aux autorités du pays qui reprochent aux hauts magistrats  de sortir de leur rôle en imposant des règles non prévues par la loi votée par le parlement. Réponse du tac au tac de la Cour : les gouvernements critiquent « l’activisme judiciaire pour masquer leurs propres échecs ».

 

Comme la Cour Suprême des États-Unis, la Cour Suprême indienne est bien davantage qu’une cour constitutionnelle, même si sa tâche première est de veiller à l’application de la constitution indienne, et ses décisions façonnent largement l’application des lois en faisant évoluer a société, ou en prenant en compte son évolution. Mais deux différences essentielles la distinguent de son homologue américaine : les juges n’y sont pas nommé à vie et leur nomination est beaucoup moins politisée qu’à Washington, mais surtout, la Cour suprême indienne n’hésite pas à s’autosaisir sans attendre que les affaires remontent à elle. Et heureusement.

 

Car la « plus grande démocratie du monde » est de plus en plus dysfonctionnelle. La violence politique et sociale progresse continûment, les atteintes aux libertés fondamentales sont légion, souvent du fait de potentats locaux au niveau des États, mais également au niveau fédéral où le parti au pouvoir tend à vouloir confisquer le pouvoir. C’est particulièrement vrai depuis que le BJP a remporté la majorité absolue des sièges à la Lok Sabha (chambre basse) en 2014 sans avoir à dépendre d’une coalition pour conserver sa majorité, comme c’était le cas sous le gouvernement précédent, dirigé par e parti du Congrès.

 

En d’autres termes, dans bien des domaines, la Cour Suprême joue le rôle de dernier recours, préservant le fonctionnement démocratique d’une société qui, sans elle, se laisserait gagner par un fonctionnement que l’on ne pourrait certainement plus qualifier de démocratique.

 

Politique et religion

 

La constitution de l’Inde est laïque (secular) mais le BJP, le parti au pouvoir se revendique de l’hindutva, le nationalisme hindou dans un pays où l’écrasante majorité de la population (plus de 80 %) est hindoue. Mais à travers ses différents jugements, la cour suprême s’est toujours refusée à définir l’hindouisme mais a mis en garde contre la tentation de politiciens gardiens auto-proclamés de l’hindouisme de l’enfermer dans un mode de vie particulier. En revanche, la Cour Suprême a décidé en 2017 qu’aucun politicien ne peut invoquer la religion pour gagner des suffrages. La vérité oblige cependant à dire que cette décision est violée presque quotidiennement à travers le pays tout entier.

Dans ce pays extrêmement conservateur sur le plan des mœurs, les plus hauts magistrats indiens ont récemment rendu des décisions qui s’éloignent notablement de la pudibonderie victorienne qui s’est abattue depuis deux siècles sur la terre qui a donné naissance Kama Sutra et qui héberge les sculptures érotiques de Khajurao.

 

Les droits des femmes

 

Fin septembre, la Cour suprême a ordonné à tous les temples hindous d’ouvrir l’accès aux femmes, quel que soit leur âge. En effet, les des temples les plus important, celui d’Ayyapa au Kerala, était interdit aux femmes de 10 à 50 ans, considérées comme impures car susceptibles d’avoir leurs règles. La veille, la haute juridiction avait décriminalisé l’adultère et mis fin au traitement différencié, selon qu’il s’agissait d’un homme ou d’une femme. Une décision dans la droite ligne de celle prise au début de ce même mois de septembre 2018 lorsque la Cour Suprême, dans une décision de 500 pages s’ouvrant par des citations de Goethe, John Stuart Mill et Shakespeare, abroge la fameuse section 377 du Code Pénal, lui aussi hérité de la colonisation britannique, pénalisant l’homosexualité.

 

Le droit à la vie privée

 

S’il est un pays où la notion de vie privée ne va pas de soi, c’est bien l’Inde : la surpopulation des villes et d’une bonne partie des campagnes fait que l’on n’y est jamais seul, les familles étendues sont davantage la règle que l’exception, sauf dans les grandes métropoles et par conséquent plusieurs générations et fratries vient habituellement sous le même toit et suivent un mode de vie tout à la fois communautaire et extrêmement hiérarchisé. Enfin, la politesse à l’indienne commande que l’on interroge son prochain (même s’il s’agit d’un inconnu assis en face de soi dans le train) sur tous les détails de sa vie… et d’y répondre lorsque l’on est interrogé, sauf à passer pour un grossier personnage.

 

C’est pourquoi plusieurs décisions de la Cour Suprême affirmant que la vie privée est un droit fondamental de la personne sont proprement révolutionnaires.

 

Cette annonce a été faite alors que la Cour examinait un recours contre la carte Aadhaar, sorte de carte d’identité biométrique mise en place à partir de 2015 pour tous les résidents. À l’origine, cette carte devait servir à identifier correctement les bénéficiaires des différentes allocations et prenait la suite de la célèbre carte de rationnement. Mais graduellement, toute une série d’intervenants on prévus au départ ont commencé à exigé que leurs services soient reliés au numéro unique d’identité de la carte Aadhaar : fournisseurs d’accès Internet, compagnies de téléphone mobile, banques, établissements scolaires, etc.

 

Comme rien n’est dit de la vie privée dans la Constitution de 1950, les juges ont décidé à l’unanimité, contre l’avis du gouvernement, que le droit à la vie privée faisait intrinsèquement partie du droit à la vie mentionné à l’article 21.

 

Liberté d’expression contre intolérance

 

Mais c’est sans doute dans le domaine de la liberté d’expression que le rôle de la Cour Suprême en tant que gardienne de la démocratie indienne a été le plus significative. La législation de l’Union indienne, plus de soixante-dix ans après l’Indépendance, continue d’être marquée par les textes répressifs hérités du colonisateur britannique. C’est notamment le cas de la loi sur la sédition, qu’en ces temps d’intolérance les autorités et leurs partisans ont tendance à invoquer à tout bout de champ contre opposants, intellectuels et journalistes par trop critiques, en dépit du fait que l’article 19 de la Constitution garantit la liberté d’expression et que l’Inde a signé et ratifié le Pacte international relatif aux droits civils et politiques dont l’article 19 garantit, lui aussi, cette liberté.

 

En 2015, la haute juridiction a déclaré anticonstitutionnel un article de la loi sur les technologies de l’information qui permettait de poursuivre pénalement les auteurs de propos injurieux, insultants ou malveillant. Pour la Cour Suprême, ces restrictions n’étaient pas raisonnables et « ce qui est offensant pour l’un peut ne pas l’être pour un autre », et la Cour d’exiger que toute restriction soit formulée en termes précis, et proportionnelle au but légitime recherché – formulation très proche de la jurisprudence de la Cour européenne des Droits de l’Homme. « L’Internet doit favoriser la liberté politique et non la répression », écrivent les juges dans leur arrêt.

 

Dans d’autres décisions, la Cour a affirmé le droit au silence, qui inclut celui de ne pas chanter l’hymne national dans un établissement scolaire ou universitaire, ce qui est hardi, en ces temps où l’on est prompt à faire la chasse aux « anti-nationaux ».

 

Le « droit à la dissidence »

 

Tout récemment, c’est le droit à la dissidence qui a été garanti par la Cour Suprême indienne. En août 2018, cinq intellectuels d’extrême-gauche ont été arrêtés par la police du Maharashtra sous l’accusation d’avoir comploté pour attenter à la vie du Premier ministre Narendra Modi et de soutenir la guérilla maoïste des Naxalistes. Le terme « naxalistes urbains », forgé pour désigner les intellectuels suspects de mal pensé, a été surabondamment utilisé par les politiciens et une grande partie des médias pour désigner ces suspects, et plus généralement, les intellectuels critiques du c-gouvernement actuel. Mais dans une conférence de presse tenue par la police du Maharashtra, la police de l’État n’a produit que des livres et écrits, certes parfois recourant à une rhétorique révolutionnaire, mais n’évoquant en rien un tel complot.

 

Saisie en urgence par les avocats des cinq suspects, la Cour Suprême a ordonné qu’ils ne soient pas envoyés en prison mais placés en résidence surveillée le temps de l’enquête. Dans leur décision, les magistrats précisent : « La dissidence est la soupape de sécurité de la démocratie… La cocotte-minute explosera si vous ne faites pas de place aux soupapes de sécurité ». La Cour a également sévèrement commenté la conférence de presse tenue par les policiers en dehors de tout processus judiciaire.

 

La liberté artistique

 

La plus haut juridiction indienne s’est également instituée protectrice de la liberté de création. Depuis plusieurs années, nombre de films sont l’objet de vives attaques avant même leur sortie, soit parce qu’ils abordent des sujets controversés, soit parce qu’ils font appel à des acteurs pakistanais, soit parce qu’ils ne donnent pas le point de vue que certains considèrent comme la seule vérité. Voici Une dizaine d’années, le célèbre peintre indien MF Husain a été arrêté à plusieurs reprises et ses œuvres détruites par des extrémistes hindous du Bajrang Dal, puis du Shiv Sena. De multiples plaintes sont lancées contre ce peindre qui a le malheur d’être musulman et d’avoir osé représenter des divinités hindous en tenue légère. Menacé de mort, il doit quitter le pays et s’installe en Inde où il meurt en 2011 alors que la Cour Suprême vient d’annuler le mandat d’arrêt à son encontre.

 

Fin 2017, cette frénésie de censure se poursuit mais la Cour Suprême y met le holà en écrivant que les tribunaux indiens doivent se montrer « extrêmement précautionneux » lorsqu’ils s’ingèrent dans la liberté artistique et le président de la Cour précise : « la liberté d’expression est sacro-sainte et on ne doit pas normalement interférer avec elle (…) Que ce soit dans un film, une pièce de théâtre ou un roman, qui sont des expressions de la création artistique, l’artiste à la liberté de s’exprimer d’une façon qui est légalement répréhensible. » Et la Cour suprême de préciser que les limites à la liberté d’expression prévues par l’alinéa 2 de l’article 19 de la Constitution ne doivent pas être invoquées pour tuer la créativité artistique !

 

Le juge Dipak Misra, qui a présidé la Cour suprême depuis un peu plus d’un an, prend sa retraite en ce début octobre 2018. Son successeur, qu’il a lui-même choisi parmi les autres magistrats de la Cour doit être formellement désigné par le président de la République, est Ranjan Gogoi, qui s’était pourtant publiquement opposé à lui voici quelques mois. Mais au bout du compte, l’unité de la Cour Suprême, où les opinions dissidentes des juges minoritaires sont publiées selon la tradition anglo-saxonne, a prévalu face à la tentation du pouvoir politique de prendre le contrôle de l’institution judiciaire.

 

Pour l’instant, celle-ci résiste bien et la Cour Suprême, à juste titre, est vue par une majorité d’Indiens comme le dernier rempart de l’homme ordinaire face aux tentations des politiques de contrôler leur vie.

Gujarat : victoire à la Pyrrhus pour Modi ?

Par Olivier Da Lage

Le résultat des élections législatives au Gujarat, l’Etat qu’a dirigé Narendra Modi pendant plus de douze ans, sont désormais connus. Comme il était prévisible, le BJP l’a à nouveau emporté, mais -et c’est la vraie leçon de ce scrutin- avec une marge très faible dans bien des circonscriptions.

Ce qui a sauvé la mise au BJP est l’implication personnelle de Modi dans la campagne quotidiennement pendant près de trois semaines (incidemment, c’est la véritable raison du report du voyage de Macron initialement prévu en décembre) qui a transformé ce vote en plebiscite pour ou contre Modi, fils de la terre du Gujarat.

Autre leçon, la spectaculaire remontée du Congrès, donné quasiment pour mort naguère encore, campagne menée par Rahul Gandhi, tout nouveau président du Congrès à la suite de sa mère Sonia. Il y a peu, il était de bon ton d’évoquer sur un ton condescendant cet héritier réticent à assumer la relève. Or, tout le monde s’accorde à dire qu’il a mené une bonne campagne et a su trouver le ton juste.

Bien entendu, les élections générales de 2019 ne sont pas encores perdues pour le BJP et Modi est un formidable animal politique. De même, le Congrès a encore beaucoup à faire pour seulement envisager la possibilité de revenir au pouvoir à Delhi.

Mais si personne ne conteste la victoire du BJP au Gujarat, elle à un goût amer pour le parti de Narendra Modi tandis que la défaite du Congrès est plus douce que beaucoup l’avaient prédit. Une victoire chèrement acquise pour le tout-puissant Modi dans son fief même, une performance largement inattendue pour Gandhi en terre a priori hostile : les jeux ne sont pas encore faits pour 2019.

Inde-Israël. Convergence de deux ethnonationalismes Narendra Modi en visite à Tel-Aviv

Le Blog d'Olivier Da Lage

Par Olivier Da Lage et Pierre Prier

Cet article est initialement paru sur Orient XXI le 3 juillet 2017

Un quart de siècle après l’établissement des relations diplomatiques entre l’Inde et Israël, Narendra Modi est attendu pour la première fois en Israël le 4 juillet. Un événement qui marque le rapprochement spectaculaire entre les deux pays.

C’est la première visite d’un chef de gouvernement indien, le véritable détenteur du pouvoir selon la Constitution indienne, en Israël où vivent près de 70 000 juifs originaires d’Inde1.

Narendra Modi, porte-flambeau du nationalisme hindou, n’a jamais caché son admiration pour Israël, où il s’est déjà rendu en 2006 lorsqu’il dirigeait l’État indien du Gujarat. Ni son évidente proximité idéologique avec le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou, fondée sur le nationalisme hindou pour le premier, juif pour le second, chacun respectant en l’autre l’« homme fort » qui conçoit la politique avant…

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Inde-Israël. Convergence de deux ethnonationalismes Narendra Modi en visite à Tel-Aviv

Le Blog d'Olivier Da Lage

Par Olivier Da Lage et Pierre Prier

Cet article est initialement paru sur Orient XXI le 3 juillet 2017

Un quart de siècle après l’établissement des relations diplomatiques entre l’Inde et Israël, Narendra Modi est attendu pour la première fois en Israël le 4 juillet. Un événement qui marque le rapprochement spectaculaire entre les deux pays.

C’est la première visite d’un chef de gouvernement indien, le véritable détenteur du pouvoir selon la Constitution indienne, en Israël où vivent près de 70 000 juifs originaires d’Inde1.

Narendra Modi, porte-flambeau du nationalisme hindou, n’a jamais caché son admiration pour Israël, où il s’est déjà rendu en 2006 lorsqu’il dirigeait l’État indien du Gujarat. Ni son évidente proximité idéologique avec le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou, fondée sur le nationalisme hindou pour le premier, juif pour le second, chacun respectant en l’autre l’« homme fort » qui conçoit la politique avant…

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L’Inde, désir de puissance

 

Dans la presse :

Olivier Da Lage : “Hier chantre du non-alignement, l’Inde se préfère aujourd’hui multi-alignée” , (Paroles d’Actu, interview par Nicolas Roche, 6 mars 2017)

Désir de puissance de New Delhi, une quête encore inachevée, Tirthankar Chanda (L’Hebdo, rfi.fr 24 février 2017)

Géopolitique, le débat (RFI, 19 février 2017) animé par Marie-France Chatin, avec
Vaiju Naravane, écrivain et journaliste. « Transgressions », collection roman du Seuil.
Jean-Luc Racine, directeur de recherches au CNRS
Olivier Da Lage, journaliste. « L’Inde, désir de puissance », Armand Colin.

Le Blog d'Olivier Da Lage

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Mon livre sur les défis stratégiques de l’Inde paraît mercredi 22 février chez Armand Colin.

Dans la presse :

Géopolitique, le débat (RFI, 19 février 2017) animé par Marie-France Chatin, avec
Vaiju Naravane, écrivain et journaliste. « Transgressions », collection roman du Seuil.
Jean-Luc Racine, directeur de recherches au CNRS
Olivier Da Lage, journaliste. « L’Inde, désir de puissance », Armand Colin.

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Le Blog d’Olivier Da Lage

Le blog d’un journaliste intéressé par l’Inde et le Moyen-Orient et par les débats de sa profession

A reversal of Globalisation?

By Olivier Da Lage
Commenting on both Trump’s victory and the vote in favour of Brexit in the UK, the ILO director general Guy Ryder said: “It is the people who feel they haven’t benefited from globalisation and from the EU, from the way things are organised. This is the revolt of the dispossessed in that regard”[1].
Worldwide, free-trade agreements (FTA) are threatened. Donald Trump has steadily promised to scrap both NAFTA, the free trade agreement concluded between Mexico, Canada and the USA more than 20 years ago as well as the Transpacific agreement signed just one year ago. Public opinion (and therefore, politicians alike) in the US and Europe have an increasingly negative view of the TTIP, the free trade agreement being negotiated between The United States and the European union, while the Canada-UE FTA was on the brink of failure when a Belgian provincial parliament refused to ratify it unless it received reassurances on some key issues (such as private arbitration courts) which eventually were given, thereby enabling its signature[2].
Even in countries where free-marketeers used to call the shots, such as the UK, the Netherlands and – to a much lesser extent – the USA, “globalisation” has become a spectre for voters across the political spectrum, sounding more like “loss of jobs” than “booster of growth”. True, the “alter-globalisation” movement is losing momentum. However, the fear of globalisation is no longer confined to it: during the last US presidential election, all the main candidates, Trump, Clinton and Sanders campaigned against globalisation. In the Brexit referendum vote, the resentment towards European immigrants was more of a factor than a rejection of the EU as such.
Next in line now is France, where free market was never a popular theme. Even though, as the fifth world economic power, France has vastly benefited from globalisation, most candidates in the run-up to the April 2017 presidential election, including “pro-business” ones insist on their duty to protect citizens against the fallout of globalisation. Such trends can indeed be seen all across Europe.
The reason why the anti-globalisation trend is picking up in the West is that very different forces are merging in a de facto coalition.
On the one hand, one finds old opponents of globalisation who always considered it a bad thing: blue collar workers and the political parties representing them who fear it is all about transferring jobs from their countries to emerging countries where salaries and labour laws are less protective and therefore perceived as unfair competition. They include many workers’ unions, communist parties and other left and far left parties in Europe as well as a good deal of the popular vote in the US among the Democratic electorate and the trade union movement. But increasingly, the popular vote goes to far right or popular parties who blame the loss of jobs not only on foreigners abroad but also on foreign immigrants “stealing” the job of local citizens: UKIP in the UK, Front National in France, “True Finns” in Finland, Party of Freedom in the Netherlands, etc.
Other long-standing opponents include many left-leaning intellectuals, especially in France, who consider globalisation as a threat to cultural diversity, i.e. the “americanisation” of other cultures.
But what really changed the paradigm is that these opponents have now been joined by mainstream figures and parties as was obvious in the Brexit vote, the US presidential election and the ongoing French presidential election campaign. These newcomers have added their voices to the anti-globalisation choir for opportunistic reasons because they have sensed which the wind is blowing and are desperately trying to retain their voters. But there is more to it than this: the feeling is that the Reagan-Thatcher drive towards deregulation has gone too far, has been damaging the social fabric and created widening poverty pockets. In the past 30 years, the difference of salaries between the bottom and the top of the ladder has increased from 1:10 to 1:400 or more and the social acceptance of this widening gap at a time when the economy is barely recovering from the 2008 crisis is just not there.
By contrast, in India, where globalisation has for two decades been synonymous with outsourcing from Western companies and massive inflow of FDI (foreign direct investments), the word does not carry a negative connotation, far from it. But appearances can be deceptive. In 1998, the financial crisis which severely hit the global financial markets hardly affected the Indian economy. Ten years later, India had to face a sudden massive outflow of capital in the wake of the subprime financial crisis. Back in 1998, India was still largely insulated from the world financial markets by the many rules on foreign exchange which were subsequently relaxed. This was no longer the case in 2008. As a result, huge amounts of FDI were hastily repatriated from India to the US or to Europe, not because of the economic situation in India but because these investors desperately needed the cash back home.
The narrative in India is generally that this country supports globalisation and criticises the protectionist practices of Western governments but on the issue of globalisation, India now sits on both sides of the fence. On the one hand, as an “emerging” country, India still offers more for less in many areas and needs globalisation. On the other hand, as an already “emerged” country, India requires regulations to protect its intellectual property. For decades, it was not a priority but as a major exporter of cultural goods and services, India now has an increasing stake in ensuring its artistic works are not stolen.
In the field of agriculture, all Indian governments have always taken a protectionist stance for fear of the brutal consequences of free trade in a sector still employing 60 percent of the active population with generally low productivity and many farmers poverty-stricken.
Globalisation does not divide the West and the rest of the world. The actual oppositions lie within each country and every government has to grapple with the contradictions between the benefits and the negative consequences of the very same phenomenon. As going back on globalisation is not an option even for those hostile to it, the challenge for governments and international institutions is to find how to reign in its excesses, manage it politically, and make it acceptable to their public[3].
—–
[1] “Economic frustration has spawned Trump and Brexit, warns UN labour chief”, The Guardian, 14 November 2016.
[2] “La contestation contre le libre-échange gagne du terrain”, Le Monde, 25 October 2016.
[3] Lawrence H. Summers, “It’s time for a reset”, The New York Times, 5 December 2016.
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13 février 2017Leave a replyModifier

Saudi prince: not quite a game changer?

Prince Salman’s accession to the throne after the death of Saudi King Abdullah on 23 January 2015 has been a game changer, both domestically and in West Asian politics. Within days, he sidelined rivals within the House of Saud, and took on Iran with a confrontational policy. But two years later, the results of his new strategy disappoint.
 
By Olivier Da Lage
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31 janvier 2017Leave a replyModifier

Inde-Pakistan : le théorème de Tchékhov

Le Premier ministre indien Narendra Modi a donc reçu ce samedi à sa résidence de fonction les chefs des trois armes pour examiner la riposte indienne à l’attaque qui a fait 18 morts parmi les soldats qui se trouvaient sur la base d’Uri, dans le Cachemire, à proximité de la Line of Control (LoC) qui sert de ligne de démarcation entre le Cachemire indien et le Cachemire pakistanais.
Selon Delhi, l’attaque aurait été menée par une organisation basée au Pakistan, jaish-e-Muhammad (l’armée de Mahomet). Mais contrairement à ce qui s’était passé après l’attaque de la base militaire indienne de Pathankot le 2 janvier dernier, Inde et Pakistan ont aussitôt échangé des propos martiaux. A l’époque, au contraire, l’Inde s’était gardée de mettre en cause directement le Pakistan, où Narendra Modi venait tout juste de rencontrer le Premier ministre Nawaz Sharif et avait même invité une délégation militaire pakistanaise à se rendre sur cette base pour se rendre compte par elle-même.
Ce geste n’avait pas donné les résultats espérés par l’Inde et le gouvernement de Narendra Modi avait été à mots couverts accusé de naïveté par certains observateurs et même des responsables de son propre parti le BJP. Les mois qui ont suivi ont été marqués par un net durcissement de la rhétorique de part et d’autres. Pour revenir à l’attaque d’Uri, le ministre de l’Intérieur, a immédiatement accusé le Pakistan d’être un Etat qui soutient le terrorisme. Modi, pour sa part, a tweeté pour indiquer que l’attaque ne resterait pas impunie. L’Assemblée générale des Nations unies qui s’achève à New York a été l’occasion pour l’Inde de mettre en cause le Pakistan et de tenter de l’isoler diplomatiquement. Cela risque de s’avérer plus difficile que prévu car la Chine s’est immédiatement portée en défense d’Islamabad et la Russie, l’alliée traditionnelle des bons et des mauvais jours, a entamé des manœuvres militaires communes avec le Pakistan.
Ce dernier, contrairement aux incidents précédents, n’a en rien promis de restreindre l’activité des groupes armés opérant à partir de son territoire, ni même d’ouvrir une enquête. Il a au contraire, par la voix de son Premier ministre Nawaz Sharif s’exprimant de la tribune des Nations unies, mis en cause la répression indienne au Cachemire comme étant l’unique cause de la tension actuelle.
En mai 2011, après le raid américain dans lequel Oussama Ben Laden a été tué au Pakistan (Opération Geronimo), nombreux étaient ceux, dans les milieux militaires, parmi les journalistes et surtout, les dirigeants du BJP alors dans l’opposition, à exprimer leur frustration que l’Inde ne lance pas son Opération Géronimo en territoire pakistanais pour éradiquer les bases terroristes qui s’y trouvent. Narendra Modi n’était pas le dernier.
Aujourd’hui au pouvoir, Modi est soumis à semblable pression, y compris de son propre camp, au nom de la rhétorique nationaliste qu’il a lui-même incarnée avant d’accéder au pouvoir.
Tchékhov a dit et écrit que dans une pièce de théâtre, si une arme chargée se trouve sur la scène dans l’acte premier, elle doit nécessairement avoir servi avant la fin du dernier acte. Les armes sont déjà sur la table, et elles sont chargées. Il paraît difficile d’imaginer que l’Inde puisse, cette fois, s’épargner une opération militaire « chirurgicale » en territoire pakistanais contre l’un des groupes terroristes qui y pullulent. Mais personne n’est en mesure de prédire l’enchaînement qui en résultera.
Olivier Da Lage
 
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24 septembre 20161 ReplyModifier

Islamic State and France: mortal enemies

France’s state policy of ‘laïcité’ (secularism) and its military interventions in Islamic countries has made it the prime target of IS in the West. The hardline French response to step up bombing campaigns against jihadis in Syria, Iraq, and Mali will likely continue, but conversely feeds IS strategy, which is to foment anti-Muslim sentiment among the non-Muslim French population.
By Olivier Da Lage
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21 juillet 2016Leave a replyModifier

Comment peut-on ne pas être Nordique ?

Par Olivier Da Lage
Depuis la relance de la FIJ en 1952, le groupe des syndicats nordiques joue un rôle déterminant. Syndicats puissants et riches, ils ont participé de façon prépondérante à la direction ou à l’orientation de la Fédération jusqu’au congrès de Cadix en 2010. Et en 2013, lors du congrès de Dublin, la seule représentante d’un syndicat nordique au sein du Comité exécutif a été sévèrement battue lors des élections.
Dire que la perte du contrôle de la FIJ a été un traumatisme pour les Nordiques est un euphémisme. Ils se sont rattrapés en conservant celui de la FEJ, la Fédération européenne des journalistes (le groupe européen de la FIJ), mais ce n’est pas la même chose. Certains ont songé – mais pas longtemps – à quitter la FIJ pour se consacrer entièrement à la FEJ mais ce projet n’a pas vécu longtemps. La première mesure de rétorsion après la perte de la majorité à Cadix a été la suspension immédiate de la contribution danoise au Fonds d’entraide de la FIJ, au motif que l’argent n’était pas dépensé. Jusqu’au congrès de Cadix, le trésorier n’était autre que le président du syndicat danois qui devait donc avoir une idée des raisons pour lesquelles cet argent n’était pas employé comme son syndicat le voulait, mais c’est un débat interne à son syndicat, digne de Hamlet. Dépenser ou ne pas dépenser, telle est la question.
Quoi qu’il en soit, l’attitude des syndicats nordiques post-Cadix a été perçue par la majorité comme la bouderie de mauvais perdants ne supportant pas d’avoir perdu le pouvoir au sein de la Fédération et exerçant des représailles avec l’arme qui leur restait : l’argent. Ils s’en sont servi pour créer des scissions au sein de syndicats africains (subventions et salaires confortables à la clé) favorisant ceux qui voteraient « bien » au prochain congrès. La même tendance a pu être discernée en Asie et en Amérique latine.
Mais c’était plus une impression qu’une certitude. Et comment croire que d’authentiques journalistes, authentiques syndicalistes pourraient s’abaisser à de tels comportements. N’était-ce pas de notre part pure médisance et soupçons infondés ?
La réponse à cette interrogation est venue du nouveau président du syndicat des journalistes danois Lars Werge lui-même lors du congrès de la FIJ qui vient de se tenir à Angers. Lars est un homme de grande taille, plutôt raide dans son maintien comme il l’est dans ses propos. Brutal, même. Ou, si l’on veut se montrer indulgent, direct et sincère. Quoi qu’il en soit, Lars Werge, dans ses propos publics comme sur sa page Facebook, ne cache rien de ses impressions, mais il va beaucoup plus loin : il donne de passionnantes informations sur la façon dont les syndicats nordiques de la FIJ conçoivent leur rôle au sein de la Fédération. Et ça décoiffe !
Il commence par revenir sur le cheval de bataille de son syndicat, le Fonds d’entraide. Selon lui, la FIJ manque de transparence. Et quand le secrétaire général de la FIJ Anthony Bellanger lui répond qu’il peut venir s’en expliquer à Copenhague ou que Lars peut venir lui-même à Bruxelles vérifier les chiffres, la réponse ne satisfait visiblement pas le président du syndicat danois. C’est pourquoi se met en place le grand projet des Nordiques : placer l’un des leurs au poste de trésorier en remplacement de l’Allemand Wolfgang Mayer. Lars Werge écrit, au troisième jour du congrès : « Il y a une bonne nouvelle : le Finlandais Juha Rekola est prêt à se présenter au poste de trésorier honoraire. C’est un homme fort qui fera beaucoup mieux que l’Allemand Mayer – et avec le soutien total de l’alliance du Nord, qui a déjà entrepris un travail de lobbying dans les couloirs, je pense qu’il sera élu. La décision interviendra demain. »
Bon, les Nordiques veulent l’un des leurs à la trésorerie. C’est légitime et les manœuvres de couloirs font partie de la vie de tous les congrès. Que nous réserve le lendemain ?
« C’est le congrès le plus paresseux auquel il m’ait été donné d’assister » confie, au quatrième jour, un vétéran de la FIJ à Lars qui peste devant les nombreuses pauses des assemblées plénières, suspendues dans l’attente des rapports des commissions. Pourquoi attendre aussi longtemps dans une journée où l’on doit aller de l’avant et élire le président et le trésorier ? s’énerve Werge. Qui soupire : « c’est malheureusement l’un des nombreux inconvénients quand différents modes de culture sont présents ». Cette remarque est pleine de bon sens et dénote un sens de l’observation particulièrement acéré. Parmi les quelque 300 délégués présents à Angers, les Nordiques sont aussi peu nombreux qu’ils sont homogènes. Il y a par contre plein de Russes, d’Européens du Sud, d’Africains, de latino-américains, d’Asiatiques qui se comportent différemment. Ça fait désordre. En même temps, c’est le principe même d’une fédération internationale… « Nous, les Danois arrivons à l’heure, alors que d’autres délégués (et même les employés du secrétariat) arrivent 10-20-30 minutes après l’heure prévue. Il est d’usage que les séances commencent avec jusqu’à une demi-heure de retard. C’est une sorte d’épreuve. J’ai conscience que deux minutes peuvent avoir une autre signification dans le monde réel », observe néanmoins avec philosophie Lars Werge. Et le monde réel diffère parfois des rêves nordiques, n’est-ce pas, Lars ?
« C’est comme si Dracula se présentait pour diriger la banque du sang »
Parmi les élections à venir, celle qui l’intéresse véritablement est celle sur laquelle il fonde de grands espoirs : le choix du trésorier. Face à son poulain finlandais, Werge s’étrangle en découvrant que le président sortant Jim Boumelha ose se présenter alors que le rapport du trésorier sortant évoquait la veille les difficultés financières de la FIJ. « À mon avis, c’est comme si Dracula se présentait pour diriger la banque du sang », remarque finement Lars Werge. Heureusement, face à ce monstre sanguinaire, son héraut est un adversaire de valeur : « Juha Rekola, calme et fin, avec de nombreuses années d’expérience sur les plans politique et technique. C’est lui que nous soutenons et c’est le jour ».
Mais lorsque le résultat du scrutin est annoncé, il faut déchanter : Boumelha l’emporte par 176 voix contre 153 à Rekola. Werge n’en revient pas que les congressistes aient apporté leur confiance au président sortant, responsable de tous les maux de la Fédération. Il se console en échafaudant l’hypothèse que si 12 délégués avaient inversé leur vote, le résultat eut été tout autre. En effet. Avec des « si », on met Paris en bouteille…
Un accord entre les Nordiques pour prendre la présidence
Mais ça ne se passera pas comme ça. « Avec les autres Nordiques, nous avons un accord en 10 points où figurent nos objectifs et nos attentes et cet accord a été conclu à la fin 2015. Cet accord précise entre autres que le groupe nordique doit présenter un candidat. C’est ce que nous avons fait au niveau européen en sélectionnant Mogens Blicher Bjerregård pour sa réélection à la tête de la FEJ et il a été élu. Le Suédois Jonas Nordling était prêt à concourir mais il a dû annuler sa participation au congrès. Du coup, il est dans la liste des candidats au Comité exécutif, mais le vote n’a pas encore eu lieu. »
« Juha n’a pas été élu comme trésorier, poursuit Werge. Avec le recul, je pense que la prochaine fois, nous devrons être plus pointus dans la préparation. » Et le président danois de se consoler en pensant à tout le travail qu’il pourra accomplir au Danemark dans son syndicat. À en juger par l’instructive lecture de ses commentaires Facebook, il n’y trouvera pas les traits culturels tellement désolants qu’il a si bien dénoncé chez les autres, – ceux qui n’ont pas la bénédiction d’être nés Nordiques – et qui, malheureusement, ne veulent pas comprendre que tant dans leur vote que leur façon de se comporter, ils devraient prendre exemple sur la rigueur nordique.
Comment, oui, comment, le reste du monde peut-il ne pas être Nordique ?
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Couvrir la Palestine: l’avenir incertain du journalisme en zone dangereuse. Rapport de mission de la FIJ (avec Aidan White), novembre 2001

Déontologie des médias : vraies questions, fausses bonnes idées (Legipresse, n° 233, juillet 2006)

Droits d’auteur des journalistes sur Internet : une piste pour sortir de l’impasse, (Juriscom.net, 4 octobre 2005)

Droits d’auteur et statut du journaliste (Intervention à la SCAM le 30 septembre 1998)

L’enterrement de Khomeiny, Matériaux pour l’histoire de notre temps, 1997, vol 46, n°1

L’Internet, métamédia, (Revue internationale et stratégique n° 56, hiver 2004-2005)

La Cour européenne consacre la protection des sources (Le Journaliste, n° 239, 3ème trimestre 1996)

La couverture des conflits et les risques militaires, le cas de la guerre d’Irak de 2003-2004 (intervention au colloque du CERIME à Strasbourg en mai 2004, in La guerre en Irak, les médias et les conflits armés, Bruylant, 2006)

La presse saisie par l’Internet («Communication & langages», septembre 2001)

La solidarité en action: les journalistes irakiens face aux défis du changement. Rapport de mission de la FIJ et de la FAJ, janvier 2004

Le dernier journaliste ? (Le Journaliste , n° 283, troisième trimestre 2007)

Le premier statut des journalistes (Le Monde, 2-3 avril 1995)

Les combats syndicaux (in «Les journalistes ont-ils encore du pouvoir», Hermès n° 35, mars 2003

Les critères de professionnalisme de la Commission de la carte (in «L’identité professionnelle des journalistes», actes du colloque de Strasbourg, 25 et 26 novembre 1994, Alphacom CUEJ)

Paris wants its “CNN, French-Style” (Transnational Broadcasting Studies Journal), TBS 11, fall-winter 2003

Articles sur le Moyen-Orient

Le Monde

1991-2003 : une transition douloureuse pour les États du Golfe (Mardi 25 février 2003)

A Abou Dhabi : La création du conseil de coopération du Golfe a été marquée par des divergences sur la sécurité (28 mai 1981)

Dans les Émirats, La population s’inquiète des risques de guerre chimique (Dimanche 19 – Lundi 20 août 1990)

Il y a quinze ans, la prise de la Grande Mosquée de La Mecque (Dimanche 20-lundi 21 novembre 1994)

Il y a vingt ans, Les Britanniques quittent le Golfe (Dimanche 22- Lundi 23 décembre 1991)

L’«exception arabe» : des chercheurs s’interrogent sur l’absence de démocratie au Moyen-Orient (7 mai 1994)

La crise avant le conflit [Golfe : clefs pour une guerre annoncée, d’Alain Gresh et Dominique Vidal] (9 avril 1991)

Les monarchies pétrolières connaissent à leur tour les affres du développement (Mardi 16 octobre 2001)

Le Monde Diplomatique

Algérie, retour de mémoire (novembre 2001)

Échec de l’islam politique ? (juillet 2000)

«Plus rien ne sera comme avant» : La fragilité révélée des pétromonarchies (novembre 1990)

Bahreïn ébranlé par une vague d’émeutes (mars 1995)

Coopération régionale et obsession de la sécurité (mars 1982)

Incertaine démocratisation au Koweït (avril 1991)

La Péninsule arabique, au-delà des mythes (octobre 2004)

La prudence du Koweït dans un Golfe troublé (février 1985)

Les rêves brisés de l’unité yéménite (juillet 1994)

Nouvelle jeunesse des monarchies arabes (mars 2003)

Regain d’activisme dans le Golfe : Illusoire sécurité collective sans l’Irak et l’Iran (février 1993)

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Arabie Saoudite : L’islam aux commandes (Phosphore, décembre 1991)

Au Koweït, La démocratisation malgré l’émir (Libération, Rebonds,13 septembre 1993)

À bas la francophonie ? (Actamedia n° 2, printemps 2001)

Bahreïn n’est plus une île (Arabies, janvier 1987)

Bahreïn, Qatar et les Émirats arabes unis : «S’adapter ou disparaître »(Géopolitique, Hiver 1990-1991, n°32)

Comment peut-on être Saoudien ? (Politique Internationale n°94, hiver 2001-2002)

Entre les religieux et la famille royale, le malaise saoudien (n° 174, octobre-décembre 2001)Maghreb-Machrek

Kosovo : La guerre et le monde musulman (Revue Internationale et stratégique n°36, Hiver 1999-2000)

Koweït : Les rentiers du pétrole (Sciences et vie économie magazine n°60, avril 1990)

L’Arabie et ses voisins: la revanche des vassaux (Outre-Terre n°14, 2ème trimestre 2006)

L’émergence d’une identité « khalijienne » (1971-2004), in «Les monarchies du Golfe», ouvrage collectif sous la direction de Rémy Leveau, la Documentation française, 2005

L’industrie arabe d’armement : Le monde arabe en ordre dispersé (Les Cahiers de l’Orient, premier trimestre 1999, n°53)

L’Internet, métamédia, (Revue internationale et stratégique n° 56, hiver 2004-2005)

L’invasion du Koweït : quelques repères (Hérodote 3ème et 4ème trimestre 1990, n°58-59)

La constitution du Qatar adoptée le 29 avril 2003 (Maghreb-Machrek n° 176, été 2003)

La diplomatie de Doha : «Des yeux plus gros que le ventre » (Arabies, mai 2000)

La vie politique en Péninsule arabique : Oman, Qatar, Emirats arabes unis, Bahreïn (Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée, Edisud -REMMM- n°81-82, 1996/3-4)

Le Conseil de coopération du Golfe : Menace d’implosion ? (Les Cahiers de l’Orient, quatrième trimestre 1988, n°12)

Le vent de la démocratie souffle aussi sur le Koweït (Revue Défense Nationale, juillet 1990)

Le Yémen entre démocratisation et guerre civile (Revue Défense Nationale, février 1993)

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Stratégies omanaises dans les relations internationales et régionales,(in «Le sultanat d’Oman contemporain» ouvrage collectif sous la direction de Marc Lavergne et Brigitte Dumortier, Karthala, 2002.Stratégies omanaises dans les relations internationales et régionales,(in «Le sultanat d’Oman contemporain» ouvrage collectif sous la direction de Marc Lavergne et Brigitte Dumortier, Karthala, 2002

The Politics of Al Jazeera or the Diplomacy of Doha (in «The Al Jazeera Phenomenon: Critical Perspectives on New Arab Media», Pluto Press, ouvrage collectif coordonné par Mohamed Zayani, (2005)

Une guerre pour le pétrole ? Pas seulement, mais… (Outre-Terre n°5, 2ème trimestre 2003 )

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A reversal of globalisation

By Olivier Da Lage

Commenting on both Trump’s victory and the vote in favour of Brexit in the UK, the ILO director general Guy Ryder said: “It is the people who feel they haven’t benefited from globalisation and from the EU, from the way things are organised. This is the revolt of the dispossessed in that regard”[1].

Worldwide, free-trade agreements (FTA) are threatened. Donald Trump has steadily promised to scrap both NAFTA, the free trade agreement concluded between Mexico, Canada and the USA more than 20 years ago as well as the Transpacific agreement signed just one year ago. Public opinion (and therefore, politicians alike) in the US and Europe have an increasingly negative view of the TTIP, the free trade agreement being negotiated between The United States and the European union, while the Canada-UE FTA was on the brink of failure when a Belgian provincial parliament refused to ratify it unless it received reassurances on some key issues (such as private arbitration courts) which eventually were given, thereby enabling its signature[2].

Even in countries where free-marketeers used to call the shots, such as the UK, the Netherlands and – to a much lesser extent – the USA, “globalisation” has become a spectre for voters across the political spectrum, sounding more like “loss of jobs” than “booster of growth”. True, the “alter-globalisation” movement is losing momentum. However, the fear of globalisation is no longer confined to it: during the last US presidential election, all the main candidates, Trump, Clinton and Sanders campaigned against globalisation. In the Brexit referendum vote, the resentment towards European immigrants was more of a factor than a rejection of the EU as such.

Next in line now is France, where free market was never a popular theme. Even though, as the fifth world economic power, France has vastly benefited from globalisation, most candidates in the run-up to the April 2017 presidential election, including “pro-business” ones insist on their duty to protect citizens against the fallout of globalisation. Such trends can indeed be seen all across Europe.

The reason why the anti-globalisation trend is picking up in the West is that very different forces are merging in a de facto coalition.

On the one hand, one finds old opponents of globalisation who always considered it a bad thing: blue collar workers and the political parties representing them who fear it is all about transferring jobs from their countries to emerging countries where salaries and labour laws are less protective and therefore perceived as unfair competition. They include many workers’ unions, communist parties and other left and far left parties in Europe as well as a good deal of the popular vote in the US among the Democratic electorate and the trade union movement. But increasingly, the popular vote goes to far right or popular parties who blame the loss of jobs not only on foreigners abroad but also on foreign immigrants “stealing” the job of local citizens: UKIP in the UK, Front National in France, “True Finns” in Finland, Party of Freedom in the Netherlands, etc.

Other long-standing opponents include many left-leaning intellectuals, especially in France, who consider globalisation as a threat to cultural diversity, i.e. the “americanisation” of other cultures.

But what really changed the paradigm is that these opponents have now been joined by mainstream figures and parties as was obvious in the Brexit vote, the US presidential election and the ongoing French presidential election campaign. These newcomers have added their voices to the anti-globalisation choir for opportunistic reasons because they have sensed which the wind is blowing and are desperately trying to retain their voters. But there is more to it than this: the feeling is that the Reagan-Thatcher drive towards deregulation has gone too far, has been damaging the social fabric and created widening poverty pockets. In the past 30 years, the difference of salaries between the bottom and the top of the ladder has increased from 1:10 to 1:400 or more and the social acceptance of this widening gap at a time when the economy is barely recovering from the 2008 crisis is just not there.

By contrast, in India, where globalisation has for two decades been synonymous with outsourcing from Western companies and massive inflow of FDI (foreign direct investments), the word does not carry a negative connotation, far from it. But appearances can be deceptive. In 1998, the financial crisis which severely hit the global financial markets hardly affected the Indian economy. Ten years later, India had to face a sudden massive outflow of capital in the wake of the subprime financial crisis. Back in 1998, India was still largely insulated from the world financial markets by the many rules on foreign exchange which were subsequently relaxed. This was no longer the case in 2008. As a result, huge amounts of FDI were hastily repatriated from India to the US or to Europe, not because of the economic situation in India but because these investors desperately needed the cash back home.

The narrative in India is generally that this country supports globalisation and criticises the protectionist practices of Western governments but on the issue of globalisation, India now sits on both sides of the fence. On the one hand, as an “emerging” country, India still offers more for less in many areas and needs globalisation. On the other hand, as an already “emerged” country, India requires regulations to protect its intellectual property. For decades, it was not a priority but as a major exporter of cultural goods and services, India now has an increasing stake in ensuring its artistic works are not stolen.

In the field of agriculture, all Indian governments have always taken a protectionist stance for fear of the brutal consequences of free trade in a sector still employing 60 percent of the active population with generally low productivity and many farmers poverty-stricken.

Globalisation does not divide the West and the rest of the world. The actual oppositions lie within each country and every government has to grapple with the contradictions between the benefits and the negative consequences of the very same phenomenon. As going back on globalisation is not an option even for those hostile to it, the challenge for governments and international institutions is to find how to reign in its excesses, manage it politically, and make it acceptable to their public[3].

—–

[1] “Economic frustration has spawned Trump and Brexit, warns UN labour chief”, The Guardian, 14 November 2016.

[2] “La contestation contre le libre-échange gagne du terrain”, Le Monde, 25 October 2016.

[3] Lawrence H. Summers, “It’s time for a reset”, The New York Times, 5 December 2016.

Inde-Pakistan : le théorème de Tchékhov

Le Premier ministre indien Narendra Modi a donc reçu ce samedi à sa résidence de fonction les chefs des trois armes pour examiner la riposte indienne à l’attaque qui a fait 18 morts parmi les soldats qui se trouvaient sur la base d’Uri, dans le Cachemire, à proximité de la Line of Control (LoC) qui sert de ligne de démarcation entre le Cachemire indien et le Cachemire pakistanais.

Selon Delhi, l’attaque aurait été menée par une organisation basée au Pakistan, jaish-e-Muhammad (l’armée de Mahomet). Mais contrairement à ce qui s’était passé après l’attaque de la base militaire indienne de Pathankot le 2 janvier dernier, Inde et Pakistan ont aussitôt échangé des propos martiaux. A l’époque, au contraire, l’Inde s’était gardée de mettre en cause directement le Pakistan, où Narendra Modi venait tout juste de rencontrer le Premier ministre Nawaz Sharif et avait même invité une délégation militaire pakistanaise à se rendre sur cette base pour se rendre compte par elle-même.

Ce geste n’avait pas donné les résultats espérés par l’Inde et le gouvernement de Narendra Modi avait été à mots couverts accusé de naïveté par certains observateurs et même des responsables de son propre parti le BJP. Les mois qui ont suivi ont été marqués par un net durcissement de la rhétorique de part et d’autres. Pour revenir à l’attaque d’Uri, le ministre de l’Intérieur, a immédiatement accusé le Pakistan d’être un État qui soutient le terrorisme. Modi, pour sa part, a tweeté pour indiquer que l’attaque ne resterait pas impunie. L’Assemblée générale des Nations unies qui s’achève à New York a été l’occasion pour l’Inde de mettre en cause le Pakistan et de tenter de l’isoler diplomatiquement. Cela risque de s’avérer plus difficile que prévu car la Chine s’est immédiatement portée en défense d’Islamabad et la Russie, l’alliée traditionnelle des bons et des mauvais jours, a entamé des manœuvres militaires communes avec le Pakistan.

Ce dernier, contrairement aux incidents précédents, n’a en rien promis de restreindre l’activité des groupes armés opérant à partir de son territoire, ni même d’ouvrir une enquête. Il a au contraire, par la voix de son Premier ministre Nawaz Sharif s’exprimant de la tribune des Nations unies, mis en cause la répression indienne au Cachemire comme étant l’unique cause de la tension actuelle.

En mai 2011, après le raid américain dans lequel Oussama Ben Laden a été tué au Pakistan (Opération Geronimo), nombreux étaient ceux, dans les milieux militaires, parmi les journalistes et surtout, les dirigeants du BJP alors dans l’opposition, à exprimer leur frustration que l’Inde ne lance pas son Opération Géronimo en territoire pakistanais pour éradiquer les bases terroristes qui s’y trouvent. Narendra Modi n’était pas le dernier.

Aujourd’hui au pouvoir, Modi est soumis à semblable pression, y compris de son propre camp, au nom de la rhétorique nationaliste qu’il a lui-même incarnée avant d’accéder au pouvoir.

Tchekhov a dit et écrit que dans une pièce de théâtre, si une arme chargée se trouve sur la scène dans l’acte premier, elle doit nécessairement avoir servi avant la fin du dernier acte. Les armes sont déjà sur la table, et elles sont chargées. Il paraît difficile d’imaginer que l’Inde puisse, cette fois, s’épargner une opération militaire « chirurgicale » en territoire pakistanais contre l’un des groupes terroristes qui y pullulent. Mais personne n’est en mesure de prédire l’enchaînement qui en résultera.

Olivier Da Lage

India, Iran, and greater West Asia

Prime Minister Modi will embark on his visit to Iran on 22 May, a month after his visit to Saudi Arabia. India’s careful balancing of relations with competing parties in West Asia has let it remain a friend for all. However, to play a role commensurate with the one it intends to play on the world stage, India needs to work on becoming more than a friend and rather an indispensible partner to countries in the region.



By Olivier Da Lage
Read the full text on Gateway House’s website

Jours ordinaires au Cachemire

Par Olivier Da Lage 
Peut-on considérer que cinq jours en touriste font de vous un reporter ? Sûrement pas. Mais les impressions que l’on en retire peuvent-elles aider à la compréhension de la situation locale ? Je le crois. Le court séjour que je viens d’effectuer au Cachemire a dans tous les cas remis en perspective tout ce que j’avais pu lire ou entendre sur le sujet.

Sur la route menant de l’aéroport à Srinagar, la capitale du Jammu et Cachemire, tous les magasins sont fermés bien que l’ on soit un mercredi en plein cœur de la journée. Mon chauffeur donne l’explication sans même que la question lui ait été posée. « Avant-hier, une lycéenne a été harcelée par des soldats. En réaction, des jeunes Cachemiris ont manifesté devant des postes militaires et ont jeté des pierres en direction des soldats. Ces derniers ont riposté en tirant à balles réelles, tuant deux jeunes et en blessant de nombreux autres. C’est pourquoi il y a aujourd’hui une grève générale. Ça va sûrement durer plusieurs jours. »

La plupart des rues de Srinagar sont calmes, mais dans certains quartiers, la présence militaire est visible. Rideaux fermés sur les boutiques, soldats en patrouille, blindés légers surmontés d’une tourelle pour le mitrailleur, check points fréquents, indifférence calculée des passants qui font mine d’ignorer la présence de ces soldats venus de toutes les régions de l’Inde, couvre-feu, cela m’évoque irrésistiblement des souvenirs : la dernière fois que j’ai vu de telles scènes, c’était en Cisjordanie sous occupation israélienne.

Le lendemain, nous prévoyons de nous rendre à Gulmarg, sur les hauteurs montagneuses surplombant le Pakistan,à l’ouest de Srinagar. Mais une demi-heure à peine après avoir quitté l’hôtel, le chauffeur range sa voiture au bord de la route, où sont arrêtées de nombreux autres véhicules touristiques. Au loin sur la route monte une fumée noire. Des pneus brûlent sur la chaussée comme un avertissement à ceux qui seraient tentés de persévérer : un caillassage en règle les attend. Demi-tour donc et tourisme à Srinagar : le jardin Moghol, le jardin des tulipes, le jardin Nishat, le jardin Shalimar, une virée sur là lac Dal en shikara (la gondole locale). Parfait après-midi touristique, rien à signaler, si ce n’est la forte présence militaire qui jalonne notre parcours.

Le lendemain, départ matinal pour Pahalgam, une station d’altitude d’où l’on peut explorer les vallées et les glaciers dans un cadre qui évoque irrésistiblement les Alpes (l’endroit est d’ailleurs connu comme la « petite Suisse »), à ceci près que l’acharnement des villageois à vendre des babioles ou à se proposer comme guide sans rien avoir à expliquer illustre l’extreme pauvreté d’une population qui se refuse à mendier.

Pour le retour le lendemain, le chauffeur est inquiet : le bilan des affrontements est désormais passé à cinq morts et des dizaines de blessés. Entendue par la police, la jeune fille affirme désormais que ce ne sont pas des militaires qui l’ont importunés mais des jeunes de son école. Pour les Cachemiris, ces nouvelles déclarations ont été faites sous la pression policière. Bref, non seulement la tension ne retombe pas, mais elle est montée de plusieurs crans. Il risque d’y avoir des émeutes sur la route du retour. Pour parer à ce risque, le chauffeur propose que nous quittions Pahalgam à 5 heures. Nous lui faisons confiance, d’autant que les téléphones étrangers ne fonctionnent pas au Cachemire, non plus que les cartes SIM prépayées. Quant à l’internet, il a été coupé sur la plus grande partie du territoire pour éviter que les protestataires ne coordonnent leur mouvement sur Facebook ou par WhatsApp.

Concentré et silencieux, le chauffeur roule à vive allure. Nous rallions Srinagar pratiquement sans avoir croisé de véhicules sur la plus grande partie du chemin en tout juste deux heures. Le trajet prend habituellement trois heures et demie. Notre chauffeur a vu juste. Nous apprendrons le lendemain que ceux des touristes qui ont emprunté la même route une heure après nous ont été interceptés par des émeutiers, des pierres lancées sur leur véhicules et certains des chauffeurs extraits de force de leur voiture et passés à tabac pour ne pas avoir respecté la grève.

Le lendemain, le gouvernement indien dépêche plusieurs bataillons anti-émeutes venus du reste du pays et ordonné aux militaires de rester cantonnés dans leur caserne. New Delhi semble s’être enfin avisée que les soldats ne sont pas entraînés à maintenir l’ordre, mais à tirer sur l’ennemi, contrairement aux forces de police.

Il ne fait aucun doute que les services pakistanais et les militants séparatistes qu’ils soutiennent profitent de la situation. Mais justement : l’embrasement ne survient que parce que la situation est hautement inflammable : lors des inondations catastrophiques de 2014, les dons envoyés par solidarité de l’Inde tout entière se sont évaporés avant d’atterir dans la poche de dirigeants bien placés. La population n’en a jamais vu la couleur et son appauvrissement a pris des allures catastrophiques.

Résignés, plusieurs Cachemiris voient s’effondrer leur rêve de connaître enfin une saison touristique florissante (avec la sortie de l’hiver, elle vient tout juste de commencer). Le tourisme est pratiquement la seule ressource économique du territoire, déserté par l’industrie. Les jeunes formés à l’université ont peu d’espoir de trouver un emploi correspondant à leur qualification – voire un emploi tout court – et quand c’est le cas, le salaire est quatre fois inférieur à celui qu’il obtiendrait pour le même travail à Delhi. Les plus talentueux s’exilent. Pour les autres, c’est No Future.